Derrière l’image de carte postale, l’Autriche est en train de refondre en profondeur la façon dont ses villes se développent, se logent, se déplacent et se protègent face au climat. Entre grands chantiers de logements, transition énergétique des bâtiments, nouvelles lignes de métro et de chemins de fer, plans climats ambitieux et « villes éponges », le pays s’est engagé dans une décennie décisive.
Plusieurs villes autrichiennes, dont Vienne, Graz, Linz, Salzbourg et Innsbruck, expérimentent des modèles urbains intégrant logement, adaptation climatique, mobilité durable et inclusion sociale, avec un objectif commun : améliorer la qualité de vie.
Loger une population urbaine en plein essor sans sacrifier l’accessibilité
L’un des moteurs principaux des projets urbains en Autriche est très simple : la population urbaine continue d’augmenter. Environ 64 % des habitants du pays vivent déjà en ville, et dans la capitale, la croissance est spectaculaire. Vienne, qui compte aujourd’hui environ 1,9 million d’habitants, devrait atteindre les 2 millions avant 2030 ; l’aire métropolitaine dépassera les 3 millions. Depuis le début des années 2000, la population viennoise a grimpé d’environ 25 %, et le cap des 200 000 habitants supplémentaires attendus d’ici la fin de la décennie impose une production massive de logements.
Nombre de nouveaux logements que Vienne prévoit de construire entre 2014 et 2025 selon son plan de développement urbain STEP 2025.
L’ampleur de l’effort est particulièrement visible dans la construction neuve. Entre 2010 et 2021, 311 100 nouveaux bâtiments ont été construits dans tout le pays, représentant 130 millions de mètres carrés de surface utile. En parallèle, le secteur du logement social et coopératif reste un pilier : environ un quart du parc résidentiel autrichien est constitué de logements sociaux, et près d’un logement sur quatre au niveau national est loué à un organisme à but non lucratif ou à une municipalité. Les coopératives à but limité gèrent plus d’un million de logements, assurent plus de 40 % des constructions plurifamiliales neuves et occupent plus de 80 % du segment prix le plus bas pour les constructions récentes.
Plus de 60 % des habitants de Vienne vivent dans un logement subventionné.
Des loyers encadrés, un secteur à but limité et un effet d’entraînement sur l’ensemble du marché
Cette architecture institutionnelle n’est pas seulement sociale, elle est aussi un instrument de stabilisation du marché. Les logements gérés par les associations à but limité affichent en moyenne des loyers de 25 % inférieurs à ceux du secteur privé lucratif ; les loyers municipaux se situent encore plus bas. Les données disponibles donnent un panorama intéressant :
| Type de parc locatif en Autriche | Loyer moyen mensuel estimé | Particularités |
|---|---|---|
| Logement municipal (Vienne) | ≈ 480 € | Fort contrôle public, baux ouverts, protections élevées |
| Logement associatif/LPHA | ≈ 590 € | Coopératives à but limité, accès sur critères de besoin |
| Location privée non régulée | ≈ 770 € | Loyers libres, hausse beaucoup plus rapide |
Les études montrent un effet de « refroidissement » du marché : chaque augmentation de 10 % de la part de logements au coût réel (cost‑based) permettrait de réduire les loyers de marché d’environ 0,40 € par m². Sur le long terme, la stratégie de production massive de logements subventionnés pèse donc sur l’ensemble des prix, y compris dans le privé.
Entre 2021 et 2023, les loyers ont parfois augmenté de 25 %, tandis que l’offre locative a chuté de plus de 13 % en 2024, alors que la demande devrait croître de près de 10 %. En réponse, le gouvernement a adopté 55 mesures, incluant un gel des loyers régulés en 2025, des plafonds de hausse à 1 % (2026) et 2 % (2027), une limitation des augmentations dans le non-régulé, et l’extension de la durée minimale de bail de trois à cinq ans.
L’impact budgétaire est loin d’être marginal. Sans interventions, la hausse des loyers prévue en avril 2025 aurait représenté un surcoût cumulé de l’ordre de 138 millions d’euros pour les locataires. Le gel annoncé touchera plus d’un million de logements, dont plus de 500 000 appartements anciens, près de 697 000 logements coopératifs et 220 000 logements municipaux viennois.
Des quartiers modèles pour un urbanisme compact, mixte et climatiquement neutre
Le discours autrichien sur les villes de demain ne s’arrête pas à la seule question du nombre de logements. Il porte aussi sur la forme urbaine, le mélange des fonctions, la place de la nature et l’empreinte carbone. Vienne revendique un urbanisme compact et économe en sols : elle affiche la plus faible surface imperméabilisée par habitant du pays, environ 79,3 m² par personne, contre une moyenne nationale de 330,1 m². La moitié de son territoire municipal est encore couverte d’espaces verts, et environ un tiers de la surface de la ville est de l’espace vert public, soit près de 13 000 hectares.
Aspern Seestadt, Nordbahnhof, Donau City : les grands laboratoires urbains
Parmi les grands projets emblématiques, l’ancienne base aérienne d’Aspern, à l’est de Vienne, a été transformée en « aspern – Vienna’s Urban Lakeside », l’un des plus vastes projets d’extension urbaine d’Europe. Sur 240 hectares (environ 800 acres), la ville construit un nouveau quartier appelé à accueillir 20 000 à 25 000 habitants et quelque 20 000 emplois d’ici la fin des années 2020. Le site est conçu comme un démonstrateur de la ville durable : plus de 40 hectares de forêt y ont été plantés, un lac artificiel central sert d’élément paysager et de régulateur microclimatique, et les immeubles testent des solutions basse énergie et à énergie positive dans le cadre du programme de recherche « Aspern Smart City Research ».
Le quartier Nordbahnhof à Vienne est un exemple de reconversion d’une ancienne friche ferroviaire. Sur 85 hectares, cet ancien faisceau de triage a été transformé en un quartier mixte comprenant logements et bureaux, avec la particularité d’intégrer un parc de 10 hectares laissé en évolution naturelle spontanée, qualifié de « nature urbaine ». Les enquêtes révèlent que la satisfaction des habitants concernant la vie communautaire y est supérieure de près de 30 % par rapport à des quartiers plus conventionnels.
Donau City, urbanisée sur d’anciens terrains inondables entre le vieux Danube et le canal canalisé, incarne un autre versant de la stratégie : un pôle de tours de bureaux et d’habitation, avec notamment la DC Tower 1 (250 m de haut), ainsi que le projet Danube Flats, annoncé parmi les plus hauts immeubles résidentiels d’Europe riveraine.
Ces projets s’accompagnent souvent de concours de promoteurs structurés, un outil de contrôle que Vienne utilise systématiquement : les propositions sont évaluées sur la base de critères de durabilité sociale, de qualité architecturale, de performance environnementale et de faisabilité économique. Depuis 1995, chaque programme neuf subventionné dans la capitale est évalué avec une grille de qualité, ce qui a progressivement élevé les standards.
La stratégie viennoise s’appuie sur un principe de « mixité sociale » assumé : le logement social n’est pas réservé aux ménages les plus pauvres, les plafonds de revenus pouvant aller jusqu’à 180 % du revenu médian de la zone. L’accès est contrôlé à l’entrée, mais les locataires n’ont pas à quitter leur logement si leurs revenus augmentent. Cette logique crée des ensembles où classes populaires et moyennes cohabitent.
Les quartiers à revenus mixtes peuvent générer jusqu’à 35 % d’augmentation des liens communautaires.
La politique de zonage social, introduite en 2018, ajoute une couche supplémentaire : sur les grandes parcelles d’aménagement à Vienne, deux tiers des surfaces de plancher doivent être consacrés à des logements abordables, avec un contrôle durable des loyers. La ville dispose de 3,2 millions de m² de réserves foncières dédiées au logement social, gérées par le Wohnfonds Wien, corporation quasi‑publique chargée d’acquérir et de préparer les terrains.
Faire de la ville un allié face au climat : du bâtiment passif à la ville éponge
L’Autriche a fixé la neutralité climatique à l’horizon 2040, un objectif repris à la fois au niveau fédéral et par la Ville de Vienne. La stratégie nationale d’adaptation au changement climatique, révisée en 2024, insiste sur un double pilier : réduire les émissions et s’adapter aux impacts déjà inévitables. Les villes sont en première ligne.
Depuis les années 1990, le pays s’est imposé comme l’un des pionniers européens du bâtiment très performant. Le standard « maison passive », né en Autriche au milieu des années 1990, y a connu un essor spectaculaire : plus de 14 000 bâtiments y répondent à ce jour, souvent avec des économies de 75 à 90 % sur les besoins de chauffage et de rafraîchissement par rapport à une construction conventionnelle. Dans les meilleurs immeubles collectifs neufs équipés de pompes à chaleur, la consommation finale pour le chauffage et l’eau chaude peut tomber autour de 12 à 13 kWh par m² et par an, soit un niveau qui rapproche le secteur du seuil climatique visé de 6 kg CO₂e par m² à l’horizon 2030.
Décarboner un parc existant massif : rénovation douce et sortie du gaz
Si la nouvelle construction est devenue très performante, l’essentiel des émissions provient encore du bâti existant. Vienne a lancé un vaste programme de rénovation via la campagne « Wir SAN Wien » et son bras opérationnel WieNeu+, qui conjugue rénovation des quartiers, adaptation climatique et participation citoyenne. Historiquement, la capitale a déjà pratiqué la « rénovation douce » depuis les années 1970, encadrée par la loi de 1984 sur la réhabilitation des logements : entre 1984 et 2001, près de 142 000 appartements ont été remis aux normes, et le nombre de logements considérés comme sous‑équipés a été divisé par plus de deux.
La ville de Vienne s’est engagée à éliminer l’usage du gaz pour le chauffage, l’eau chaude et la cuisson dans ses bâtiments d’ici 2040 via la campagne « Raus aus Gas ». Environ 1 400 immeubles, représentant près de 95 000 appartements, sont concernés. Pour accompagner cette transition, une prime de décarbonation de 1 000 à 1 500 euros est proposée aux habitants pour participer aux coûts de substitution. Des projets pilotes, comme la rénovation avec surélévation en bois et isolation lourde d’un ensemble des années 1960 à Gregorygasse, démontrent l’efficacité de cette démarche, permettant de réduire les besoins énergétiques de 87 %.
Les investissements sont massifs : environ 80 chantiers de rénovation sont en cours dans les ensembles municipaux, pour un volume d’environ 800 millions d’euros. À Deutschordenstrasse, deux immeubles des années 1950 basculent vers une alimentation géothermique, avec point d’information sur site pour les locataires. Ailleurs dans le pays, des rénovations exemplaires comme celle du complexe « Wir inHAUSer » à Salzbourg (passage de 75 à 99 logements, bascule du gaz vers une combinaison chaleur fatale + biomasse + photovoltaïque, réduction de parkings au profit d’une station de mobilité partagée) montrent l’orientation générale.
L’ensemble est soutenu par la politique de subvention de l’habitat (« Wohnbauförderung »), qui a mobilisé environ 2,2 milliards d’euros en 2023, et par des fonds nationaux dédiés à la décarbonation (environ 370 millions la même année). Dans les Länder, ces enveloppes servent à financer surcoûts de performance énergétique, passage aux énergies renouvelables et mesures d’adaptation.
Une ville éponge pour survivre aux canicules
La dimension la plus visible du changement climatique en ville reste la chaleur. À Vienne, les journées à plus de 30 °C sont passées d’une moyenne de 9 par an (1961–1990) à plus de 20 (1991–2020) ; dans la décennie récente, on tourne autour de 28 jours de fortes chaleurs par an, voire davantage lors de pics comme l’été 2003, qui avait comptabilisé 44 jours de vague de chaleur et 180 décès excessifs. Les nuits dites « tropicales » (température qui ne descend pas sous les 20 °C) se multiplient également : en moyenne, près de neuf nuits par an à Vienne entre 2011 et 2021, contre trois dans les décennies précédentes, avec un record de 42 nuits tropicales en 2015. Au niveau national, la chaleur causerait déjà plus de morts que la route.
Pour lutter contre le réchauffement urbain, Vienne déploie des infrastructures vertes et bleues et a cartographié ses îlots de chaleur. Une étude identifie dix districts vulnérables où les températures pourraient augmenter de 8 °C d’ici 2050 sans action.
En réponse, la capitale a lancé plusieurs programmes concrets. Le dispositif « Coole Straßen » a transformé, dès 2019–2020, des rues denses de quartiers vulnérables en espaces rafraîchis : suppression du stationnement, sols plus clairs, plantations, brumisateurs temporaires. Une évaluation menée rue Kirchengasse (7ᵉ arrondissement) a montré qu’avec davantage d’arbres, de surfaces végétalisées et de sols clairs, le stress thermique ressenti par les piétons pouvait être réduit jusqu’à 15 °C. Dans le parc Esterházy, des opérations d’ouverture des sols, de végétalisation et d’installations de brume ont permis de faire baisser jusqu’à 6 °C la température perçue.
Deux textes adoptés récemment structurent l’action : l’amendement 2023 au code de la construction de Vienne interdit désormais le rejet direct des eaux de pluie dans le réseau d’égouts et renforce la protection des arbres en rue, tout en facilitant les toitures et façades végétalisées ; la révision 2024 de la loi sur la protection des arbres introduit des obligations plus strictes en matière de replantation et d’entretien dans la durée, avec exigence de qualité des essences de remplacement. Le principe de « ville éponge » se diffuse : infiltration maximale de l’eau in situ, pilotage du ruissellement pour nourrir les arbres et limiter les inondations, multiplication des surfaces non scellées.
Ces principes ne concernent pas que Vienne. On les retrouve par exemple à Graz, Innsbruck ou dans la ville de Tulln, où la place Nibelungenplatz est en train d’être reconvertie d’un parking de 211 places en espace vert et place de rencontre, avec réduction du stationnement à 54 places et 71 % de surface perméable. Dans plusieurs agglomérations (Linz, Barcelone, Lyon, Budapest, mais aussi Linz et Vienne), les voies de tramways sont progressivement engazonnées, ajoutant des continuités vertes, tandis que des places comme Johann‑Nepomuk‑Vogl‑Platz ou Praterstern sont réaménagées sur ce modèle.
La ville de Vienne déploie un programme de 100 millions d’euros, « Lebenswerte Klimamusterstadt », de 2021 à 2025. Il finance environ 320 projets dans les 23 arrondissements, incluant des plantations d’arbres d’ombrage, des petites places vertes, des bancs et des jeux d’eau. Un volet spécifique soutient également la végétalisation des bâtiments et la désimperméabilisation des sols, en particulier dans les cours intérieures.
Des parcs, des forêts et des rivières renaturées
Au-delà des rues, les grandes réserves de nature urbaine évoluent aussi. Vienne prévoit de maintenir un taux d’environ 50 % d’espaces verts sur son territoire, et est déjà pionnière en matière de biodiversité avec près de 40 % de surface protégée. Plusieurs projets d’envergure arrivent : un « Parc de la Biodiversité » d’environ 11 hectares va voir le jour dans le 22ᵉ arrondissement, à l’est de l’étang de Hirschstetten ; le Donaupark est en cours de reconfiguration ; le parc Walter‑Kuhn (Favoriten) s’apprête à offrir 10 000 m² de verdure à des quartiers denses ; le vaste espace naturel « Freie Mitte » (93 000 m²) dans le 2ᵉ arrondissement sera achevé d’ici peu. La ville travaille également depuis des décennies sur la renaturation de la rivière Wien entre la périphérie et le canal du Danube, projet complexe mais emblématique de la reconquête des cours d’eau.
Dans les autres grandes villes, les stratégies de ce type sont intégrées aux plans d’urbanisme. Graz a mis en place dès la fin des années 1990 un programme thématique dédié aux espaces verts, prolongé par le concept « Green Net Graz » pour relier parcs, coulées vertes et paysages ; Linz a adopté un Plan des espaces verts dès 1985, mis à jour pour maintenir un « degré de verdissement » satisfaisant sur plus de la moitié de sa surface ; Salzbourg s’appuie sur une Déclaration de protection des espaces verts et un outil de « déduction d’espace vert » obligeant les grands projets à réserver 15 à 20 % de leur superficie à des espaces verts publics ; Innsbruck, enfin, structure ses actions via un concept d’espaces verts et un « Tree‑Line‑Concept » dédié aux alignements d’arbres.
Les estimations nationales suggèrent que dans les six grandes villes autrichiennes, l’extension des espaces verts liée à la croissance urbaine et aux mesures d’adaptation pourrait atteindre 11 % d’ici 2050, au prix d’investissements annuels moyens de l’ordre de 119 millions d’euros pour les parcs neufs jusqu’en 2030, puis 93 millions jusqu’en 2050, auxquels s’ajoutent des coûts de maintenance croissants (de 7,6 à 13,4 millions par an).
Mobilité : une révolution silencieuse des transports urbains
L’autre grande jambe de la transition urbaine autrichienne est la mobilité. Les objectifs climatiques impliquent de réduire de façon drastique les émissions du secteur, qui représentent encore une part importante des gaz à effet de serre nationaux. À Vienne, environ 43 % des émissions proviennent du trafic motorisé privé. La réponse se décline à la fois à l’échelle fédérale, avec le Masterplan Mobilité 2030, et à l’échelle locale, via des Plans de mobilité urbaine (SUMP) et des plans logistiques durables (SULP).
Le pari des 80:20 et de l’abonnement à 1 euro par jour
La capitale vise un partage modal de type « 80:20 » : 80 % des déplacements effectués à pied, à vélo ou en transport en commun, 20 % en voiture. Les chiffres récents montrent un chemin déjà bien engagé : en 2022, environ 35 % des trajets étaient réalisés à pied, 30 % en transports publics, avec une part de la voiture en forte baisse par rapport aux décennies passées. Le taux de motorisation est tombé à environ 381 voitures particulières pour 1 000 habitants, l’un des plus bas des métropoles comparables.
Le réseau de transports publics de Vienne transporte près de 2,4 millions de voyageurs par jour.
Les politiques de stationnement renforcent cette logique : le stationnement de courte durée est aujourd’hui généralisé dans les 23 arrondissements, avec un coût d’environ 5 € pour deux heures en voirie, tandis que les parkings relais en périphérie facturent environ 4,40 € la journée. Vienne n’a pas attendu la mode des zones piétonnes : son premier secteur piétonnier, dans la vieille ville, a été instauré dès 1974.
Extension massive du métro et grands chantiers ferroviaires
Les années à venir seront marquées par un chantier majeur : le projet U2xU5, extension combinée des lignes de métro U2 et U5. Il s’agit du plus grand projet d’infrastructure et de durabilité de la ville, avec 12 nouvelles stations et quatre nouveaux pôles d’échanges. Le 5ᵉ arrondissement, Margareten, bénéficiera pour la première fois d’une station de métro, desservant directement environ 55 000 habitants. La mise en service complète est désormais attendue autour de 2030, après des retards liés à des défis environnementaux. Les estimations avancent que ce projet permettra 300 millions de trajets supplémentaires par an en transports publics, économisera quelque 550 millions de kilomètres parcourus en voiture et créera ou consolidera près de 30 000 emplois.
C’est le montant total, en milliards d’euros, des investissements et de la maintenance prévus par les ÖBB pour le réseau ferroviaire autrichien entre 2024 et 2029.
Des projets nouveaux sont financés, comme la future ligne Köstendorf–Salzbourg, le quadruplement des voies à l’approche de Salzbourg pour séparer flux fret, régional et longue distance, ou encore la mise à double voie de tronçons clés vers le sud‑est européen. Le fret ferroviaire bénéficie d’une offensive dédiée : rallongement des voies d’évitement pour trains longs, modernisation des triages, soutien aux voies de raccordement industriels.
Bus zéro émission, mobilités actives et logistique urbaine
Les bus urbains et régionaux sont eux aussi appelés à changer de visage. Le plan de relance et de résilience autrichien consacre près de 960 millions de dollars aux mobilités zéro émission, dont une première tranche d’environ 285 millions destinée à l’achat d’environ 600 bus électriques ou à hydrogène et à la création des infrastructures de recharge ou ravitaillement. La transposition de la directive européenne sur les véhicules propres impose qu’à partir de 2021, 45 % des bus publics neufs soient « propres » (dont la moitié zéro émission), puis 65 % à partir de 2026, avec toujours au moins la moitié en zéro émission. D’ici le deuxième trimestre 2026, au minimum 650 bus urbains décarbonés doivent circuler.
Wiener Linien prévoit que tous ses véhicules municipaux seront électriques à partir de 2025-2026, avec un parc de plus de 400 bus zéro émission. Aucun nouveau bus thermique ne sera acquis après 2026. Pour soutenir cette transition, Wien Energie a ouvert la première station de ravitaillement en hydrogène pour bus et camions de la capitale dès 2021.
Les autres villes ne restent pas à l’écart. Graz a testé un bus à pile à combustible dès 2019 avec la compagnie Postbus, et le Land de Carinthie porte le projet « H2 Carinthia » pour déployer des bus fonctionnant à l’hydrogène vert local, cinq véhicules ayant déjà été acquis. À Burgenland, des lignes de bus électriques et un service de taxi à la demande (BAST) sont en cours d’extension.
En parallèle, toutes les grandes villes travaillent sur les mobilités actives. Des Masterplans nationaux pour la marche et le vélo ont inspiré des stratégies régionales (comme en Styrie ou à Salzbourg) et de nombreuses « rues scolaires » ont été instaurées pour sécuriser abords d’établissements. La capitale a déployé un système de vélos en libre‑service modernisé (WienMobil Rad), intégré aux stations multimodales WienMobil qui combinent tram, bus, train, voiture partagée et trottinettes. Une application unique, WienMobil, permet de planifier, réserver et payer tous ces services.
La logistique urbaine fait aussi l’objet d’expérimentations : un plan « Logistique 2030+ » pour la région Vienne–Basse‑Autriche regroupe 35 mesures et 133 actions, allant des livraisons nocturnes aux hubs temporaires dans des dépôts inutilisés en journée (projet Remihub), en passant par l’électrification des flottes de livraison.
Financer la transformation : le rôle clé de l’investissement public et européen
Cette mutation urbaine, qu’il s’agisse de logements abordables, de rénovation thermique, de transports collectifs ou d’espaces verts, repose sur des ordres de grandeur financiers élevés. À l’échelle de l’Autriche, près de 3 milliards d’euros de fonds fédéraux pour le logement sont alloués chaque année. Vienna, de son côté, consacre en moyenne environ 465 à 470 millions d’euros par an aux politiques de logement, auxquels s’ajoutent environ 440 millions de ressources dédiées (taxe salariale d’1 % générant quelque 240 millions de dollars, auxquels viennent environ 200 millions de remboursements de prêts, redevances de baux à construction et revenus de loyers).
La Banque européenne d’investissement a fourni jusqu’à 800 millions d’euros de financements à Erste Bank pour l’habitat au cours des six dernières années.
Les chiffres en jeu sont résumés dans le tableau ci‑dessous :
| Mécanisme / acteur | Montant approximatif | Finalité principale |
|---|---|---|
| Fonds fédéraux pour le logement | ≈ 3 Mds € / an | Construction et rénovation d’habitat abordable |
| Wohnbauförderung (subventions 2023) | ≈ 2,2 Mds € | Aides à la pierre et à la rénovation énergétique |
| Dépenses annuelles de Vienne pour le logement | ≈ 465–470 M€ | Parc municipal, coopératives, nouvelles constructions |
| Recettes dédiées au logement à Vienne | ≈ 440 M$ / an | Taxe salariale, remboursements, loyers |
| Financement BEI–Erste Bank (total) | 800 M€ (34 ans) | Logements locatifs subventionnés / à but non lucratif |
| Investissements de logement liés à ces prêts | > 2,25 Mds € | Environ 11 000 logements sur plusieurs années |
| Prêts BEI récents Salzbourg/Innsbruck | 175 M€ | Appartements abordables et efficients énergétiquement |
Le secteur du bâtiment durable bénéficie aussi de programmes de recherche nationaux. Le programme « Bâtiments de demain » lancé dès 1999 par le ministère en charge des transports, de l’innovation et de la technologie a soutenu quelque 300 projets sur plus de 700 proposés, pour plus de 35 millions d’euros de subventions, incluant 25 projets pilotes grandeur nature partout dans le pays. Une deuxième phase s’est concentrée sur les bâtiments à énergie positive. Plus récemment, la série « Lighthouses for resilient cities 2040 » ou les laboratoires d’innovation comme « Smart Cities Demo » accompagnent des quartiers entiers.
La puissance du modèle autrichien ne doit pas occulter ses zones de fragilité. Sur le terrain social, environ 20 000 personnes sont officiellement enregistrées comme sans‑abri en Autriche, mais l’organisation BAWO, plateforme nationale des services pour les personnes sans domicile, estime que le chiffre réel, incluant le sans‑abrisme caché, est environ deux fois plus élevé, pour une population de 9 millions d’habitants. Un rapport commandé par l’État en 2021 concluait que 25 000 logements abordables intégrant une stratégie « Housing First » permettraient de mettre fin au sans‑abrisme d’ici le milieu de la décennie.
Lancé en 2021 avec un financement du ministère fédéral des Affaires sociales, ce projet a testé une mise à l’échelle de l’approche Housing First. Il a mobilisé 27 ONG dans tous les Länder et le secteur du logement à but limité. Entre septembre 2021 et avril 2023, il a permis à plus de 1 100 personnes de s’installer durablement dans environ 550 logements, avec plus de 60 % de femmes parmi les adultes aidés. Les frais initiaux habituellement exigés des locataires ont été pris en charge par un budget public, et les associations ont été soutenues par des formations, rencontres et webinaires coordonnés par BAWO.
Le secteur coopératif, à l’origine réservé en grande partie aux nationaux, s’ouvre progressivement à une population de plus en plus diverse – à Vienne, environ 30 % des résidents sont de nationalité étrangère, mais le taux de naturalisation reste inférieur à 1 %. Cependant, la législation autrichienne ne collecte pas de données sur l’origine ethno‑raciale, ce qui complique la mesure des discriminations et la mise en place de politiques de justice raciale explicites dans le logement. Certains observateurs pointent aussi les obstacles créés par des exigences strictes en matière de citoyenneté et de statut de séjour pour l’accès à certains types d’habitat.
Produire du logement, préserver l’existant abordable, protéger les locataires, prévenir l’exclusion et promouvoir un récit nouveau autour de la ville solidaire sont considérés comme indissociables.
Les autorités locales et la Global Policy Leadership Academy
Une Europe de l’Ouest regardée… et un modèle sous pression
Vue de l’étranger, l’Autriche, et particulièrement Vienne, est devenue une référence. La capitale a été classée plusieurs fois ville la plus agréable à vivre du monde par Mercer et l’Economist Intelligence Unit, première dans plusieurs classements de « smart cities » et « villes vertes ». Des études de terrain, comme la « Vienna Social Housing Field Study », comparent par exemple le cas de Vienne à celui de San Diego : 1,9 million d’habitants et 470 millions de dollars de dépenses annuelles pour l’habitat social d’un côté, 1,4 million d’habitants et seulement 13 millions de dollars pour le logement abordable de l’autre. Là où presque 60 % des Viennois vivent dans un logement public ou social, les villes nord‑américaines peinent à atteindre des chiffres à deux chiffres.
La soutenabilité du modèle de logement social à Vienne est menacée par la remontée des taux d’intérêt (taux hypothécaires à 3,2 %), la fin prochaine de régulations de crédit comme le KIM, les pénuries de main-d’œuvre et les tensions sur les coûts de construction. Ces facteurs devraient faire chuter les livraisons de logements, de 43 400 en 2023 à moins de 30 000 prévus en 2025, malgré des solutions innovantes comme le programme WohnBAUM en bois préfabriqué.
Par ailleurs, le vieillissement des infrastructures, y compris de transport (tunnels, stations, voies ferrées), et les difficultés de recrutement dans les opérateurs publics entraînent retards et perturbations. Le rapport de la Cour des comptes de Vienne pour 2023 souligne ainsi le manque de renouvellement des effectifs à Wiener Linien, malgré des efforts récents sur les salaires et la formation linguistique.
Les villes autrichiennes adoptent une stratégie d’urbanisme planifié et fortement régulé pour répondre à l’urgence climatique. Cette approche inclut la transformation d’anciens aérodromes en quartiers neutres en carbone, la conversion d’ensembles des années 1950 à la géothermie, la réduction drastique de la place de la voiture, la végétalisation de parkings et le financement de milliers de logements coopératifs. Cette orientation est cruciale dans un contexte où les dommages climatiques coûtent déjà plus de 2 milliards d’euros par an au pays, avec une projection pouvant atteindre 12 milliards d’ici 2050 sans action supplémentaire.
Les projets de développement urbain à venir en Autriche se lisent ainsi comme la déclinaison concrète de trois choix politiques assumés : considérer le logement abordable comme une infrastructure essentielle au même titre que les rails ou les réseaux d’eau ; faire de la ville un outil de protection climatique, plutôt qu’une victime passive du réchauffement ; et mettre la mobilité collective et active au cœur de la fabrique urbaine. Reste à voir dans quelle mesure ce modèle, aujourd’hui envié, saura se maintenir et s’adapter à l’épreuve du temps, des crises économiques et des tensions sociales à venir.
Un chef d’entreprise français d’environ 50 ans, avec un patrimoine financier déjà bien structuré en Europe, souhaitait diversifier une partie de son capital dans l’immobilier résidentiel en Autriche afin de chercher du rendement locatif et une exposition à l’euro hors de France. Budget alloué : 400 000 à 600 000 euros, sans recours au crédit.
Après analyse de plusieurs marchés (Vienne, Graz, Linz), la stratégie retenue a consisté à cibler un appartement familial dans un immeuble récent d’un quartier en développement de Vienne ou Graz, combinant un rendement locatif brut cible d’environ 4–5 % – en gardant à l’esprit que « plus le rendement est élevé, plus le risque est important » – et un potentiel de valorisation à moyen terme, avec un ticket global (acquisition + frais + éventuels rafraîchissements) d’environ 500 000 euros.
La mission a inclus : sélection de la ville et du district, mise en relation avec un réseau local (agent immobilier, notaire, conseiller fiscal), choix de la structure la plus adaptée (propriété directe ou via société patrimoniale) et définition d’un plan de diversification dans le temps. Ce type d’accompagnement permet de profiter des opportunités du marché autrichien tout en maîtrisant les risques juridiques, fiscaux et locatifs.
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