Les tendances actuelles du marché immobilier en Inde

Publié le et rédigé par Cyril Jarnias

Le marché immobilier en Inde connaît une mutation profonde. Derrière les records de ventes et de prix, une réalité plus contrastée se dessine : montée en puissance des segments moyen et haut de gamme, tensions extrêmes sur le logement abordable, essor des métropoles secondaires, explosion de l’immobilier de bureaux et arrivée massive de capitaux étrangers. Le tout sur fond de réformes publiques, de digitalisation et de pression croissante sur l’accessibilité au logement.

Bon à savoir :

Pour comprendre le marché, il faut analyser simultanément : l’évolution des prix, la structure de la demande, les politiques de logement abordable, la dynamique des bureaux et des investisseurs, ainsi que l’impact des nouvelles technologies et des bâtiments verts.

Un marché résidentiel en plein boom, mais plus sélectif

Le résidentiel indien reste dans un cycle de croissance soutenue. Entre l’exercice 2019 et l’exercice 2025, les ventes de logements dans les grandes villes ont bondi de près de 77 %. En valeur, les ventes ont atteint environ 3,47 lakh crore roupies (près de 42 milliards de dollars) en 2023, soit une hausse annuelle de 48 %. L’année 2024 a marqué un sommet de douze ans avec plus de 350 000 unités vendues dans les huit principaux marchés.

Cette vigueur s’inscrit dans une phase de montée en puissance structurelle du secteur : la valeur globale de l’immobilier en Inde est estimée à 482 milliards de dollars en 2024, avec une projection à 1,184 billion de dollars à l’horizon 2030, ce qui correspond à un taux de croissance annuel composé d’environ 10,5 %. La contribution du secteur au PIB devrait passer de 7 % en 2024 à 13 % en 2030.

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Baisse annuelle des ventes résidentielles au deuxième trimestre 2025 dans les sept principales villes françaises.

Des prix en forte hausse dans les métropoles

Globalement, l’indice officiel des prix de l’habitat publié par la Reserve Bank of India (HPI) progresse autour de 3 à 4 % par an, mais cette moyenne masque des hausses bien plus marquées dans les grands centres urbains. Les données de divers observatoires montrent que les valeurs dans les métropoles dépassent largement la tendance nationale.

Le tableau suivant illustre les prix moyens au quatrième trimestre 2024 dans les grandes villes, ainsi que la croissance annuelle observée.

Ville / RégionPrix moyen (INR / sq ft)Hausse annuelle (%)
Ahmedabad4 40210
Bengaluru7 53612
Chennai7 17316
Delhi NCR8 10549
Hyderabad7 0533
Kolkata5 63310
Mumbai Metropolitan Region (MMR)12 60018
Pune7 10816

Dans la région métropolitaine de Mumbai, déjà la plus chère du pays, les tensions sont particulièrement visibles. Pour un petit logement de 30 m², le prix moyen est passé d’environ 4,7 millions de roupies en 2019 à 7,5 millions en 2024. Sur les cinq dernières années, les unités les plus petites (moins de 30 m²) ont vu leur prix de lancement progresser à un rythme annuel d’environ 8 %, contre 4,4 % pour les surfaces plus grandes de 60 à 160 m². Avec un foncier évalué autour de 2,16 lakh roupies par mètre carré, la marge de manœuvre pour des produits vraiment abordables reste très limitée dans cette région.

79

Les prix de l’immobilier à Hyderabad ont augmenté de près de 79 % sur une période de quatre ans.

Une « premiumisation » très nette de la demande

La tendance la plus marquante du résidentiel indien est la montée en gamme. Les ménages capables d’acheter profitent d’une situation économique jugée favorable, de revenus peu affectés par la pandémie et de la perspective d’une inflation immobilière durable pour se positionner sur des produits plus chers.

Les données sur la répartition des ventes par segment de prix sont révélatrices. Sur l’ensemble du marché :

Répartition des ventes immobilières par segment de prix

Analyse des parts de marché et de la croissance des différents segments du marché immobilier résidentiel.

Segment Intermédiaire

Représente environ 48 % des ventes avec une croissance de 12 %. Couvre les biens entre 50 lakh et 1 crore de roupies.

Segment Premium

Pèse environ 23 % des transactions avec une progression forte de 26 %. Correspond aux biens entre 1 et 2 crore de roupies.

Segment de Luxe

Part de marché limitée à environ 5 %, mais enregistre une hausse significative de 22 %. Biens au-delà de 2 crore de roupies.

Segment Abordable

Part tombée à 24 % avec un recul de l’offre de 32 %. Regroupe les biens en dessous de 50 lakh de roupies.

En 2024, les logements au‑delà de 1 crore ont compté pour près de la moitié des ventes au second semestre, soit une hausse de 29 % sur un an. Sur les neuf premiers mois de 2025, les biens à plus de 10 millions de roupies enregistrent encore une croissance de 4 % alors même que le marché global recule de 12 %. Leur part passe de 52 % des ventes début 2024 à 62 % un an plus tard. La tranche 1,5–3 crore est même identifiée comme principal moteur de croissance en 2025.

Certaines régions sont devenues quasi exclusivement haut de gamme. Dans la région de Delhi NCR, 81 % des ventes du premier semestre 2025 concernent des logements d’au moins 1 crore, à Bengaluru cette proportion atteint 70 %, à Mumbai 36 %. L’expansion rapide du nombre de ménages aisés et de très hauts revenus, combinée à la recherche de plus grands espaces, de meilleures prestations et d’un statut social affirmé, explique en partie cette bascule.

Le logement abordable : un déficit massif malgré les politiques publiques

Alors que le marché global affiche des records, le logement abordable en Inde est confronté à une double crise : un déficit structurel très important et un essoufflement de l’offre privée. Les chiffres disponibles constituent un signal d’alarme.

Une demande gigantesque, loin d’être couverte

L’urbanisation rapide, l’essor démographique et l’afflux de main‑d’œuvre vers les villes créent une demande exponentielle de logements financièrement accessibles. Une population jeune, mobile, avec des aspirations nouvelles, alimente cette demande, en particulier dans les segments Economically Weaker Sections (EWS) et Low Income Group (LIG).

Les estimations récentes indiquent un déficit actuel de logements abordables en zone urbaine compris entre 9,4 et 10,1 millions d’unités. Les besoins futurs à l’horizon 2030 ajouteraient environ 20,7 millions d’unités supplémentaires. Au total, le « besoin cumulé » en logements abordables pourrait donc s’établir entre 30 et 31,2 millions de logements d’ici 2030. Pour combler ce fossé, il faudrait, en théorie, construire environ 96 000 logements abordables par jour jusqu’à la fin de la décennie, un rythme sans commune mesure avec la réalité actuelle.

Le marché du logement abordable est pourtant loin d’être marginal. Il est évalué à 3,17 milliards de dollars en 2024 et devrait croître à un rythme annuel d’environ 19,8 % jusqu’en 2030, avec une taille de marché projetée de 67 000 milliards de roupies à cet horizon. Pour le système financier, le potentiel est colossal : banques et sociétés de crédit immobilier pourraient déployer jusqu’à 19,3 lakh crore de roupies de financements dans ce segment d’ici 2030, en supposant un recours à l’emprunt de 77 % et différents ratios prêt‑valeur.

Un effondrement de l’offre privée

Sur le terrain, la dynamique de l’offre va pourtant à rebours de la demande. Dans les principales villes, le ratio entre les nouveaux lancements et les ventes dans le segment abordable s’est littéralement effondré. Il était supérieur à 1 en 2019 et 2020 (autour de 1,05–1,20), ce qui signifie que les promoteurs lançaient un peu plus d’unités qu’il ne s’en vendait. Au premier semestre 2025, ce ratio tombe à environ 0,36 : pour trois logements abordables vendus, un seul est mis sur le marché.

Exemple :

En 2018, les logements à moins de 5 millions de roupies constituaient la majorité (52,4 %) des nouveaux projets dans les grandes villes indiennes. Au premier semestre 2025, cette part s’est effondrée à seulement 17 %. Cela signifie que désormais, plus de 80 % des nouveaux logements lancés dans les métropoles appartiennent aux segments intermédiaire, premium ou de luxe.

Les investissements privés confirment le désintérêt relatif des grands capitaux pour ce segment. Sur la période 2011‑2024, les apports de capital‑investissement dans le logement abordable n’atteignent que 1,9 milliard de dollars, soit à peine 7,8 % de l’ensemble des flux privés vers le résidentiel. Entre 2019 et 2024, les fonds étrangers ne représentent qu’environ 10,2 % de ces montants, le reste restant essentiellement domestique. De fait, la production de logements abordables est largement assurée par de petits promoteurs locaux aux capacités techniques et financières limitées.

Des freins structurels puissants côté offre

Si les promoteurs privés se tiennent à distance, ce n’est pas par manque de demande mais en raison d’une rentabilité souvent insuffisante. Plusieurs verrous jouent simultanément.

Attention :

Dans les zones urbaines bien desservies, le prix élevé des terrains rend la production de logements abordables (sous 5 millions de roupies) non viable économiquement, repoussant ces projets vers des périphéries moins équipées et moins attractives.

À cette contrainte foncière s’ajoutent des procédures d’autorisation longues, fragmentées et souvent opaques, qui allongent les délais et renchérissent les coûts financiers. L’absence de guichet unique, les multiples niveaux d’approbation et l’insécurité réglementaire découragent en particulier les acteurs de taille moyenne.

Le financement des promoteurs constitue un autre frein majeur. L’accès au crédit reste compliqué pour beaucoup de développeurs, surtout les plus petits. Or, la période récente a été marquée par une forte inflation des coûts de construction : le prix du ciment a par exemple augmenté d’environ 22 % depuis 2022, et sur quatre ans, l’inflation de la construction atteint près de 39 %, avec une hausse de 25 % des coûts de main‑d’œuvre la dernière année. Dans ces conditions, les marges déjà minces dans l’abordable se compressent, rendant de nombreux projets tout simplement non rentables.

Enfin, l’insuffisance des infrastructures (routes, eau, transports publics) dans les zones périphériques où s’implantent la plupart des programmes abordables réduit l’attractivité pour les ménages, freinant les ventes et augmentant le risque commercial pour les promoteurs. C’est ce faisceau de contraintes que les rapports spécialisés appellent à traiter via des réformes « audacieuses » côté offre : mobilisation de terrains publics, assouplissement des gabarits (FSI), financements subventionnés, zones spéciales de logement abordable reliées aux métros, procédures d’autorisation simplifiées, etc.

Accessibilité financière : des indicateurs sous tension

Du point de vue des ménages, la capacité à acheter s’est également dégradée. Deux indicateurs le montrent clairement : le ratio prix‑revenu, qui compare le prix moyen d’un logement au revenu annuel du ménage, et le ratio EMI‑revenu, qui mesure le poids de la mensualité de crédit dans le revenu.

7,5

Le ratio prix-revenu pour l’accession à la propriété en France en 2024, dépassant le seuil international de soutenabilité.

Les disparités entre villes sont extrêmes. Dans la région métropolitaine de Mumbai, le ratio prix‑revenu atteint 14,3, et la mensualité de crédit peut représenter jusqu’à 116 % du revenu moyen, ce qui signifie qu’un ménage type ne peut tout simplement pas supporter l’effort d’achat sans aides substantielles ou apport exceptionnel. À Delhi, le ratio prix‑revenu est autour de 10,1, et le ratio EMI‑revenu atteint 82 %. À l’inverse, des villes comme Ahmedabad et Chennai, avec un ratio prix‑revenu d’environ 5,1 et un ratio EMI‑revenu proche de 41 %, apparaissent beaucoup plus abordables. Kolkata, avec un ratio EMI‑revenu proche de 47 %, est considérée comme la plus accessible des grandes agglomérations.

Le tableau ci‑dessous résume ces écarts d’accessibilité.

Ville / RégionRatio Prix/RevenuEMI/Revenu (%)Commentaire d’accessibilité
Mumbai Metropolitan Region (MMR)14,3116Extrêmement tendue
New Delhi10,182Très limitée
Gurugram7,561En tension
Hyderabad61En tension
Ahmedabad5,141Relativement abordable
Chennai5,141Relativement abordable
Kolkata5,847Plus accessible parmi les grandes

Dans certaines villes, des indices spécifiques d’accessibilité confirment ces tendances. Ahmedabad est par exemple classée comme la ville la plus accessible avec un indice autour de 18 %, suivie de Pune (22 %) et Kolkata (23 %). Mumbai affiche au contraire un niveau de « stress » d’accessibilité proche de 48 %.

Une réponse publique massive, mais incomplète

Conscientes de l’ampleur du déficit, les autorités indiennes ont multiplié les programmes en faveur du logement abordable, combinant subventions à l’offre, aides à la demande et incitations fiscales.

PMAY et les autres grands programmes

Le pilier central de cette politique est la mission Pradhan Mantri Awas Yojana (PMAY), lancée en 2015 avec l’objectif explicite de garantir un toit à chacun (« Housing for All »). Cette initiative se décline en deux volets : PMAY‑Urban (PMAY‑U) pour les villes et PMAY‑Gramin (PMAY‑G) pour les zones rurales.

La première phase visait la construction de 20 millions de logements urbains et 30 millions de logements ruraux. Même si l’échéance initiale de 2022 a été repoussée pour finaliser les unités sanctionnées, une deuxième phase urbaine (PMAY 2.0) a été engagée, avec un objectif additionnel de 10 millions de logements urbains et 20 millions de logements ruraux sur cinq ans.

Astuce :

Le programme PMAY‑U (Pradhan Mantri Awas Yojana – Urban) repose sur quatre composantes principales : 1) la Bénéficiaire-Led Construction (BLC) pour l’auto‑construction, 2) l’Affordable Housing in Partnership (AHP), 3) l’In‑Situ Slum Redevelopment (ISSR) et 4) le Credit Linked Subsidy Scheme (CLSS), maintenant relancé sous forme de Interest Subsidy Scheme. Pour les ménages EWS (économiquement faibles) et LIG (à revenus intermédiaires inférieurs), les subventions directes via BLC, AHP ou ISSR peuvent atteindre 1 à 1,5 lakh de roupies par logement. Le CLSS, quant à lui, offrait une subvention d’intérêts pouvant aller jusqu’à 2,67 lakhs, directement déduite du capital restant dû, en ciblant particulièrement les foyers à faibles et moyens revenus.

En milieu rural, PMAY‑G finance chaque unité à hauteur de 1,2 lakh en plaine et 1,3 lakh dans les zones difficiles, avec un partage du financement Centre/États de 60/40 ou 90/10 selon les régions. L’ambition est de couvrir 4,95 crore de foyers ruraux éligibles d’ici mars 2029. À début 2025, plus de 3,79 crore d’allocations avaient été décidées, 3,34 crore de logements sanctionnés et 2,69 crore effectivement achevés.

Aides fiscales et statut d’infrastructure

Outre les subventions directes, le gouvernement a actionné le levier fiscal. La taxe sur les biens et services (GST) pour les logements en construction répondant aux critères d’accessibilité a été abaissée de 8 % à 1 % en 2019, réduisant substantiellement le coût d’acquisition pour les ménages. Le segment du logement abordable a également obtenu le statut d’« infrastructure », ouvrant un accès théoriquement plus facile à certains financements à long terme.

350000

Déduction fiscale annuelle maximale possible sur les intérêts d’un prêt immobilier pour logement abordable en Inde, en combinant les sections 80EEA et 24(b).

Fonds dédiés et statut de « project rescue »

Pour résoudre le problème des projets bloqués, le gouvernement a créé le fonds SWAMIH (Special Window for Affordable and Mid‑Income Housing), doté initialement pour débloquer des chantiers d’habitat abordable et moyen‑gamme à l’arrêt. Une deuxième enveloppe (SWAMIH 2.0), de 15 000 crore de roupies, a été prévue, même si, à la date du rapport, seulement 4 200 crore avaient été effectivement injectés, illustrant la lenteur d’exécution.

Parallèlement, un Affordable Housing Fund (AHF) a été créé au sein de la National Housing Bank, offrant aux prêteurs une ligne de refinancement dont le coût est plafonné à 350 points de base au‑dessus du rendement des obligations d’État à 10 ans. L’objectif est de rendre les prêts aux ménages modestes plus attractifs pour les banques et sociétés de financement de l’habitat.

Bon à savoir :

La loi RERA (Real Estate Regulation and Development Act) a renforcé la transparence, la protection des acquéreurs et la confiance dans le secteur immobilier en Inde. Il est important de noter que son application peut varier d’un État à l’autre.

Une efficacité réelle mais partielle

Ces dispositifs ont indéniablement permis de produire des millions de logements et de soutenir l’accession à la propriété de ménages qui en étaient exclus. Pourtant, la pénurie urbaine reste massive. Un groupe technique (TG‑12) avait déjà estimé à près de 18,78 millions l’insuffisance de logements urbains en 2012, ce qui a servi de base à la mission « Housing for All ». Les projections actuelles évoquent toujours un déficit urbain d’environ 10 millions d’unités, avec un besoin additionnel de 25 millions de logements abordables d’ici 2030.

Le principal angle mort des politiques reste la mobilisation de l’offre privée à grande échelle dans le segment abordable. Malgré des réductions de GST, des avantages fiscaux et le statut d’infrastructure, les contraintes foncières, réglementaires et de coût continuent de rendre ce segment peu attractif au regard des marges réalisées sur les produits premium et de luxe. Les principaux rapports plaident ainsi pour un basculement vers des réformes de l’offre, plutôt que de nouveaux dispositifs de soutien à la demande qui risquent d’alimenter encore les prix sans traiter la pénurie structurelle.

La montée en puissance des bureaux, des REITs et des capitaux étrangers

Le dynamisme du marché immobilier indien ne se limite pas au résidentiel. L’immobilier de bureaux, logistique et de data centers est en plein essor, soutenu par l’implantation massive de centres de services mondiaux (Global Capability Centres), le boom de l’e‑commerce et les investissements étrangers.

Un marché de bureaux en cycle haussier prolongé

Les chiffres de location de bureaux illustrent l’ampleur du phénomène. En 2024, près de 79 à 89 millions de pieds carrés de bureaux ont été absorbés au niveau national, un record historique. Sur les trimestres 2023‑2025, les volumes bruts de location restent régulièrement au‑dessus de 20 millions de pieds carrés par trimestre, avec une absorption nette (extension des surfaces occupées) en forte hausse.

Au premier semestre 2025, environ 42 millions de pieds carrés ont été loués dans les huit principales villes, dont 21,4 millions au deuxième trimestre, en hausse de 5 % par rapport au trimestre précédent. Le troisième trimestre 2025 affiche 22,6 millions de pieds carrés supplémentaires, soit une progression trimestrielle de 7 %. L’absorption nette atteint 13,5 millions de pieds carrés au deuxième trimestre (soit +19 % sur un an) et 16,3 millions au troisième (+35 % sur un an).

63

Bengaluru, Delhi‑NCR et Mumbai concentrent environ 63 % du volume trimestriel de bureaux au deuxième trimestre 2025.

Sous la pression d’une demande robuste, les loyers sont orientés à la hausse, avec des flambées de 15 à 16 % par an à Hyderabad et Mumbai pour certains segments prime.

Le rôle central des Global Capability Centres et du tertiaire

La demande de bureaux est tirée par plusieurs segments : Global Capability Centres (GCCs), entreprises de services IT‑BPM, opérateurs d’espaces flexibles, banques et assurances (BFSI), industriels et sociétés d’ingénierie. Les GCCs sont particulièrement structurants : plus de 1 800 centres de ce type opèrent déjà en Inde, avec une projection à 2 500 à court terme. Ils représentent environ un quart (24–27 %) des surfaces louées, avec 11,4 millions de pieds carrés pris à bail au premier semestre 2025, un niveau record.

Les sociétés IT‑BPM restent les plus gros utilisateurs en volume, avec environ un tiers des locations brutes, tandis que les opérateurs de coworking/flex représentent environ 16 à 18 %, en forte croissance, portés par une demande particulièrement vive des PME et des start‑ups. Bengaluru et Pune concentrent à eux deux plus de 60 % des surfaces prises par les GCCs, ce qui conforte leur statut de « capitales mondiales des services ».

REITs : l’institutionnalisation de l’immobilier commercial

Dans ce contexte, les Real Estate Investment Trusts (REITs) jouent un rôle structurant. En quelques années, l’Inde a constitué un marché de REITs significatif, bien qu’encore jeune comparé à ceux des États‑Unis ou de Singapour.

100

Les principaux REITs indiens totalisent plus de 100 millions de pieds carrés d’actifs opérationnels de catégorie A.

Les REITs indiens offrent des rendements moyens de 6 à 7,5 %, supérieurs à ceux de marchés matures comme les États‑Unis ou Singapour. Ils sont tenus d’investir au moins 80 % de leurs portefeuilles dans des actifs achevés et générateurs de revenus et de distribuer au minimum 90 % de leurs flux de trésorerie distribuables au moins deux fois par an. Ces exigences favorisent des actifs de grande qualité et des pratiques de gestion professionnelles.

500

La réserve d’actifs éligibles REIT dans les bureaux de catégorie A en Inde est estimée à plus de 500 millions de pieds carrés.

Afflux d’investissements étrangers et FDI

La transformation du marché immobilier s’appuie aussi sur un flux continu d’investissements étrangers. La libéralisation progressive des règles de FDI, avec une ouverture à 100 % sous la « route automatique » pour de nombreux types de projets de construction, a rendu l’Inde très attractive. Entre avril 2000 et juin 2025, le pays a reçu plus de 1,09 trillion de dollars d’investissements étrangers cumulés, tous secteurs confondus. Sur l’exercice 2024‑25, les FDI ont atteint plus de 81 milliards de dollars, en hausse de 14 % par rapport à l’année précédente.

Les investisseurs internationaux – fonds, développeurs, REITs mondiaux – ciblent en priorité les grandes agglomérations comme Delhi, Mumbai, Bengaluru, mais s’intéressent de plus en plus aussi aux villes de rang 2 et 3, en particulier pour la logistique, les parcs industriels, les entrepôts et certains segments résidentiels. Des acteurs comme Blackstone ont engagé des montants considérables, plus de 11 milliards de dollars dans l’immobilier indien, avec une part importante dédiée à Mumbai.

Le deuxième trimestre 2025 a vu un spectaculaire rebond des investissements institutionnels étrangers dans l’immobilier, avec une hausse de 242 % en glissement trimestriel, portés à près de 10 226 crore de roupies, dont environ 69 % dirigés vers les actifs commerciaux (bureaux, retail, logistique). Les capitaux proviennent majoritairement des États‑Unis, du Japon et de Hong Kong.

Nouvelles géographies : essor des villes de rang 2 et 3

Si les grandes métropoles concentrent toujours la majorité des transactions, les villes de rang 2 deviennent de véritables moteurs de croissance. Le différentiel de prix, la disponibilité foncière, l’amélioration des infrastructures et les politiques d’industrialisation attirent à la fois les investisseurs et les ménages.

40000

La valeur des ventes dans les villes de rang 2 a dépassé 40 000 crore de roupies au premier trimestre 2025.

Pour les investisseurs, ces marchés offrent des retours annoncés de 15 à 20 % par an, avec un ticket d’entrée plus faible. Pour les ménages, ils représentent une alternative plus abordable aux métropoles saturées, tout en bénéficiant de la montée en gamme progressive des services, des emplois et des infrastructures.

Technologies, co‑living, co‑working : de nouveaux usages immobiliers

La transformation du marché immobilier en Inde est également portée par l’essor du PropTech, du co‑living, du co‑working et des nouvelles formes de financement.

PropTech : digitalisation de la chaîne de valeur

Les plateformes immobilières en ligne, la réalité virtuelle, l’intelligence artificielle pour l’évaluation et la recommandation, la blockchain pour l’enregistrement foncier, l’Internet des objets pour les immeubles connectés : l’ensemble de ces solutions sont regroupées sous le terme de PropTech. Le marché indien du PropTech est évalué autour de 1,2 à 1,66 milliard de dollars en 2024‑2025 et pourrait atteindre 3,6 à 4,3 milliards de dollars à l’horizon 2031‑2033, soit une croissance annuelle de 13 à 17 %.

Les grands portails de recherche, les opérateurs de colocation, les plateformes de location de mobilier ou de copropriété fractionnée se développent rapidement, soutenus par un écosystème de start‑ups bien financées. L’objectif commun est d’accroître la transparence, de réduire les coûts de transaction et de simplifier les processusautant de points faibles historiques du marché indien.

Co‑living et co‑working : réponses à la mobilité et à la cherté

Le co‑living, en particulier pour les jeunes actifs et les étudiants, est une autre tendance structurante dans les centres urbains. Le marché global du co‑living en Inde pourrait valoir autour de 40 milliards de dollars en 2025, avec un taux de croissance annuel d’environ 17 %. De nombreuses études indiquent que le co‑living offre 20 à 30 % d’économies par rapport à une location classique d’appartement une pièce, tout en intégrant services et espaces partagés.

8000-22000

Dans les grandes villes indiennes, les loyers mensuels en co-living varient entre 8 000 et 22 000 roupies, offrant une alternative économique aux appartements indépendants.

Le co‑working suit une trajectoire similaire. Le marché indien des espaces de travail partagés, estimé à environ 0,71 milliard de dollars sur l’exercice 2023‑24, pourrait dépasser 1,5 à 2 milliards d’ici le début de la prochaine décennie, avec un taux de croissance proche de 13,5 %. Les opérateurs d’espaces flexibles représentent désormais jusqu’à 16‑18 % des prises à bail de bureaux dans les grandes villes, portés par la demande des start‑ups, des PME et même de grandes entreprises en quête de flexibilité.

Durabilité et bâtiments verts : un nouveau standard

Autre évolution majeure : la montée en puissance de la construction durable. Longtemps considérée comme un segment de niche, la certification environnementale devient progressivement un standard pour les nouveaux projets, en particulier dans l’immobilier tertiaire.

13

L’empreinte des bâtiments verts en Inde approche 13 milliards de pieds carrés, avec une croissance quasi doublée sur les cinq dernières années.

L’intérêt économique est loin d’être négligeable. Une étude JLL montre que les immeubles de bureaux certifiés peuvent afficher des loyers supérieurs d’environ 11 % et des primes de valorisation à la revente de l’ordre de 21 % par rapport aux bâtiments conventionnels, avec dans certains cas des primes locatives allant jusqu’à 24 %. Les taux de vacance y sont plus faibles, et les rendements peuvent être jusqu’à 7 % plus élevés.

20-50

Les bâtiments verts permettent des économies d’énergie de 20 à 50 %.

Les autorités encouragent ce mouvement à travers les codes d’efficacité énergétique des bâtiments (ECBC), les systèmes de notation comme GRIHA ou IGBC, des incitations fiscales (dépréciation accélérée pour certains équipements verts), des bonifications de gabarit (FSI supplémentaire de 3 à 15 % dans certaines juridictions) ou encore des rabais de taxes foncières. De nombreux promoteurs majeurs – DLF, Godrej Properties, Tata Housing, Mahindra Lifespace, Lodha – ont fait de la certification verte un axe central de leur stratégie.

Politique monétaire, crédit et perspective de marché

La trajectoire de l’immobilier indien reste étroitement liée à celle des taux d’intérêt et du crédit. Après une phase de hausse importante entre 2022 et 2023, qui a vu les taux de crédit immobilier dépasser à nouveau 9 %, la Reserve Bank of India a amorcé un cycle d’assouplissement.

100

C’est le nombre total de points de base de baisse cumulée du taux repo prévue en 2025, le ramenant autour de 5,5 %.

Pour les emprunteurs, chaque réduction de 50 points de base peut représenter des économies significatives. Des simulations montrent que sur un prêt de 50 lakh de roupies sur 20 ans, une baisse de 0,5 % du taux peut permettre d’économiser plus de 3 lakh d’intérêts sur la durée, et une réduction de 1 % peut raccourcir sensiblement la durée du prêt ou alléger fortement la mensualité. À plus grande échelle, chaque tranche de 1 lakh crore de roupies distribuée en prêts logement est censée générer entre 300 000 et 400 000 emplois directs et indirects, ce qui donne une dimension macroéconomique forte à la politique de crédit immobilier.

Bon à savoir :

Les experts anticipent une reprise de la demande immobilière, portée par un assouplissement monétaire, un environnement macroéconomique robuste et une croissance du PIB prévue entre 6 et 7 %. La récente baisse des volumes de vente, attribuée à des chocs externes temporaires (tensions géopolitiques, hausse précédente des taux), serait passagère. Une reprise du marché est attendue à partir de la seconde moitié de 2025, particulièrement si la baisse des coûts de financement se poursuit, avec un soutien accru pour les segments intermédiaire et premium.

Conclusion : un marché à deux vitesses, entre opportunité et risque social

Les tendances actuelles du marché immobilier en Inde dessinent l’image d’un secteur à la fois en pleine expansion et confronté à des défis redoutables. D’un côté, la croissance rapide du résidentiel intermédiaire et haut de gamme, l’essor spectaculaire des bureaux et des entrepôts, l’afflux de capitaux étrangers, l’émergence des REITs, l’innovation PropTech et l’adoption accélérée de normes environnementales font de l’Inde l’un des marchés immobiliers les plus dynamiques au monde.

Attention :

La crise du logement abordable et la dégradation de son accessibilité marginalisent les ménages modestes, créant un risque réel de fracture entre une Inde urbaine aisée qui accumule du patrimoine et une large partie de la population confinée à l’habitat précaire ou mal desservi.

Les solutions existent pourtant sur le papier : mobilisation plus ambitieuse des terrains publics via des PPP ciblés, hausse raisonnée des gabarits dans les zones bien desservies, financements bonifiés pour les promoteurs engagés dans l’abordable, généralisation des guichets uniques d’autorisations, intégration des technologies de construction rapide et économe, taxation des terrains urbains vacants pour limiter la spéculation, renforcement des programmes de location abordable, extension des fonds de type SWAMIH, et surtout articulation plus fine entre politiques du logement, transport, emploi et environnement.

Bon à savoir :

Dans les années à venir, la trajectoire du marché immobilier indien dépendra de la capacité des pouvoirs publics et des acteurs privés à opérer un rééquilibrage stratégique. Il s’agit de passer d’une logique centrée sur la solvabilité de la demande à une véritable stratégie d’offre de logements abordables. La réussite de ce tournant est cruciale pour permettre à l’Inde d’atteindre ses objectifs de croissance : un secteur valorisé autour de 1 000 milliards de dollars d’ici 2030 et une contribution au PIB proche de 13 %. Cela permettrait surtout d’éviter que la crise du logement ne devienne le principal frein social et économique au développement du pays.

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A propos de l'auteur
Cyril Jarnias

Cyril Jarnias est un expert indépendant en gestion de patrimoine internationale avec plus de 20 ans d'expérience. Expatrié, il se consacre à aider les particuliers et les chefs d'entreprise à construire, protéger et transmettre leur patrimoine en toute sérénité.

Sur son site cyriljarnias.com, il développe son expertise sur l’immobilier international, la création de société à l’étranger et l’expatriation.

Grâce à son expertise, il offre des conseils avisés pour optimiser la gestion patrimoniale de ses clients. Cyril Jarnias est également reconnu pour ses interventions dans de nombreux médias prestigieux tels que BFM Business, les Français de l’étranger, Le Figaro, Les Echos ou encore Mieux vivre votre argent, où il partage ses connaissances et son savoir-faire en matière de gestion de patrimoine.

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